OMC L'échec des négociations serait plus coûteux au plan politique qu'économique
Un échec des négociations en cours à l'OMC sur la libéralisation du commerce mondial aurait un coût économique "relativement faible", mais un coût politique important car il mettrait à mal le système coopératif multilatéral, selon une étude.
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Si le cycle de négociation, actuellement dans l'impasse, parvenait à une conclusion, le gain en terme de revenu réel mondial serait de 0,23%, selon les calculs du Centre d'études prospectives et d'informations internationales (Cepii). Ce chiffre se fonde sur l'hypothèse d'une réduction moyenne de 36% des droits de douanes sur les produits agricoles, d'une baisse de moitié des tarifs sur les biens industriels ainsi que des subventions aux agriculteurs dans les pays riches.
"Les gains sont très modestes au niveau mondial car on est très loin d'une libéralisation complète", l'agriculture et l'industrie ne pesant que 40% de l'activité économique mondiale, a souligné David Laborde, économiste du Cepii, lors d'une conférence de presse. De plus, les pays pourront continuer à protéger certains produits dits "sensibles" -- par exemple le riz au Japon ou le textile en Inde -- par des tarifs douaniers plus importants. Au final les "bénéfices" économiques seraient "assez minces pour les pays développés et plus prononcés mais aussi plus variables pour les pays en voie de développement", a ajouté M. Laborde.
Les pays émergents -- Brésil, Chine, Inde -- qui ont la capacité d'exporter denrées agricoles ou biens manufacturés feraient figure de grands gagnants, mais les pays moins avancés (PMA) pourraient dans certains cas y perdre. Ainsi, les pays de la zone Afrique Caraïbes Pacifique (ACP), qui bénéficient actuellement de conditions préférentielles pour exporter leurs produits vers l'Union européenne, perdraient une partie de cet avantage concurrentiel si les barrières douanières diminuent, ont rappelé les économistes du Cepii. Le Sénégal vend ainsi ses mangues à l'UE, alors qu'il est moins compétitif sur ce terrain que l'Afrique du sud ou le Brésil.
L'OMC envisage des "compensations" pour les pays lésés, par exemple un "paquet" d'aide au développement. Au plan politique en revanche, l'échec des négociations mettrait à mal "le système coopératif de l'OMC avec le risque de guerres tarifaires ou de conflits commerciaux du type Airbus/Boeing qui pourraient perdurer", a estimé M. Laborde. Les pays "perdraient foi dans le système multilatéral" et recourraient aux accords régionaux ou bilatéraux, cadres où le rapport de force n'est pas en faveur des pays les plus pauvres, a-t-il observé.
Les négociations de l'OMC semblent dans l'impasse après l'échec d'une réunion en fin de semaine dernière à Genève, les Etats-Unis ayant notamment refusé toute nouvelle concession sur les subventions à leurs agriculteurs. Désormais, "l'enjeu, c'est de savoir si les Etats-Unis sont prêts à faire un pas", a déclaré à l'AFP Yvan Decreux, chercheur au Cepii. Une perspective peu probable selon David Laborde: pour les Etats-Unis, qui sont confrontés à un déficit commercial abyssal, "parler libéralisation du commerce n'est pas évident". "Les Américains ne prendront pas d'engagement fort avant les prochaines élections présidentielles" en 2008, a-t-il jugé.
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